La Conscience en Mécanique Quantique

Publié le par Jean-Michel CHAUSSAT

Au cours de ces derniers siècles, principalement dans la pensée analytique occidentale, deux représentations distinctes s’expriment en ce qui concerne l’origine et la nature de la Conscience, selon une apparente logique binaire rationnelle/irrationnelle d’exclusion.

Pour le matérialisme, la Conscience et toutes les propriétés qui lui sont rattachées (aptitude cognitive à connaître, le soi, le non soi, l'esprit, la mémoire, les émotions et le ressenti des sentiments, mais aussi sa part subconsciente d'importance considérable) résultent de l'organisation fonctionnelle spatio-temporelle des cellules du cerveau principalement neuronales et de leurs connections. La Conscience a ainsi émergé durant les quelques dernières 500 millions d’années de l'évolution biologique, conséquemment à la mise en place des structures du cerveau pro reptilien contrôlant les fonctions vitales, paléo mammifère avec le système limbique contrôlant les comportements, et enfin le néocortex pour les fonctions sensorielles et cognitives supérieures.

Pour le spiritualisme, le corps matériel n'est qu'une enveloppe, un véhicule habité par une essence de nature supérieure, intemporelle i.e. immortelle, dotée d'une intelligence fusionnelle infinie qualifiée Ame, Esprit et dont la Source est divine. Cette représentation est dualiste, reconnaissant deux substances l'une matérielle, l'autre divine. Les religions puisent leurs inspirations du spiritualisme. En philosophie, l'ontologie fonde ses réflexions sur le concept impersonnel de «l'Etre».

Nous proposons avec l’avancée actuelle des Sciences, de développer une pensée unificatrice de l’origine et la nature de la conscience.

Le célèbre théorème d'incomplétude en mathématique, énoncé par Kurt Gödel montre qu'aucun système d’axiomes n'est assez puissant pour générer toutes les vérités mathématiques. L'esprit humain doit avoir des capacités non-algorithmiques allant au-delà des axiomes et des règles mathématiques. Roger Penrose suggère que l’aspect non algorithmique de la conscience vient de connexions avec la physique quantique.

La conscience que nous utilisons pour décrire les objets à grande échelle provoque un «effondrement» des niveaux superposés en une seule et unique possibilité. Toutefois, au niveau quantique, la conscience s’applique à un niveau inhabituel et les états superposés demeurent. La conscience humaine a d'abord évolué pour dire quelle nourriture était bonne à tel endroit, pas pour étudier les particules élémentaires.

Eugène Wigner propose que la conscience pourrait provoquer l’effondrement de la fonction d'onde et déterminer ainsi les contenus conscients. Plusieurs auteurs comme Henry Stapp ont par la suite élaboré des modèles sophistiqués autour de cette idée.

Karl Pribram a élaboré un modèle «holographique» du fonctionnement du cerveau. Il propose que la mémoire ne serait pas stockée dans les cellules à des endroits précis du cerveau, mais contenue dans les motifs d'interférences des ondes qui le parcourent.

Le physicien et mathématicien anglais Roger Penrose propose sa théorie de la «réduction objective». Il s'agit d'un nouveau processus décrit comme étant de nature gravitationnelle mais non locale, c'est-à-dire avec la possibilité d'effets à distance de la conscience. Penrose s'appuie sur la proposition de l'anesthésiologiste américain Stuart Hameroff selon laquelle la conscience émerge de la cohérence quantique au niveau des microtubules, minuscules petits tubes faits de protéines que l'on retrouve dans toutes les cellules de notre corps, y compris les neurones. Les microtubules forment en quelque sorte le cytosquelette des cellules qui participent à la division cellulaire ainsi qu'au transport des organites à l'intérieur des cellules. Les microtubules sont composés de dimères de tubuline dont l’enroulement en spirale produit un petit tube d'environ 25 nanomètres de diamètre. Ces molécules de tubuline peuvent être dans deux états différents, soit allongé soit contracté, ce qui pourrait provenir, selon Hameroff, d'une superposition d'états quantiques. Les microtubules fourniraient les conditions essentielles pour orchestrer les effondrements quantiques.

Les philosophes Rick Grush et Patricia Churchland rappellent que les microtubules se retrouvent dans toutes les cellules animales et végétales, et pas seulement dans les neurones du cerveau humain. Les substances chimiques connues pour détruire les microtubules semblent ne pas avoir d’effets importants sur la conscience. Plusieurs anesthésiants agissent sur la conscience sans affecter les microtubules. Les microtubules ne peuvent atteindre dans le cerveau les conditions de pureté et d'isolation de l’environnement requis. Les effets quantiques ne pourraient être transmis d’un microtubule à l'autre pour expliquer l'unité de la conscience.

Max Tegmark affirme que la température est trop élevée dans le cerveau pour que les particules élémentaires demeurent dans des états superposés.

Ricciardi et Umezawa assimilent les états mentaux, particulièrement les souvenirs, en terme « d'états de vide du champ quantique ». Ce sont des assemblées de neurones correspondant à des contenus de mémoire qui sont considérées comme ces « états de vide ». Et ce serait leur activation, initiée par des stimuli extérieurs, qui mènerait à des états d'excitation permettant la remémoration du contenu de mémoire encodé dans « l'état de vide ».

Giuseppe Vitiello a bonifié cette hypothèse pour y inclure les notions de structure dissipative, de chaos et de bruit quantique. Le fait que le cerveau est un système ouvert en constante interaction avec son environnement serait ici à l'origine de ses grandes capacités mnésiques.

En physique quantique, au cours du processus de mesure, il y a amplification d’un processus microscopique, qui se traduit par un phénomène physique macroscopique. C’est le cas, par exemple, de la trace d’une particule qui traverse une chambre à bulles. C’est grâce à l’amplification que nous pouvons faire l’interprétation d’un processus quantique microscopique. Ce n’est qu’après amplification qu’un processus quantique microscopique peut prendre la dénomination de phénomène physique.

Selon Jung, “l’amplification est l’extension et l’approfondissement d’une image onirique au moyen d’associations centrées autour du thème du rêve et de parallèles tirés des sciences humaines et de l’histoire des symboles (mythologie, mystique, folklore, religion, ethnologie, art, etc.). Grâce à quoi le rêve devient accessible à l’interprétation.”

Le fait que le rêve ne devient accessible à l’interprétation qu’après amplification est similaire au fait, qu’en physique quantique, un processus microscopique ne devient accessible à l’interprétation aussi qu’après amplification. Les processus psychiques inconscients comme le rêve peuvent donc être considérés par analogie à des processus quantiques “microscopiques”. Ceci plaide en faveur du fait que l’inconscient serait un système quantique.

Publié dans Science Physique

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